LA BUSE

 

Ce matin, je courais dans la forêt de Saint Germain en Laye ; comme tous les deux jours, « si rien ne s’y oppose par ailleurs », phrase couramment employée dans les règlements sécuritaires de la SNCF.

Je connais le danger occasionné par les tiques, j’ai dû en enlever une récemment toute petite mais bien vivante, et l’existence de sangliers. Ces derniers sont très discrets en dehors des traces de fouissage qu’ils laissent après leur passage. J’en ai aperçu à deux ou trois reprises depuis que je cours en forêt.

Je courais donc, en pensant à ce que je pourrais écrire sur la Ligne de Narbonne à Ouveillan, dans Souvenirs Narbonnais, quand j’entendis un bruissement d’ailes autour de moi. Tout à coup, je vis une buse me doubler et tourner un peu plus loin au milieu des arbres assez hauts qui m’environnaient. Je n’y prêtais pas plus attention quand soudain je sentis un choc violent sur la tête heureusement protégée par une casquette de bonne qualité. Parfois, j’arbore des casquettes très légères offertes dans des courses, ce n’était heureusement pas le cas. La buse venait de me heurter le crâne violemment et s’éloignait à tire d’aile.

Je me retournais pour la voir se poser sur une haute branche. Je ne pus pas m’empêcher de la houspiller : « Ca va pas la tête !!! ». Je ne sais pas si c’est cela qui l’a calmée, mais elle a arrêté de me pourchasser. Je vous avoue que je me suis retourné maintes fois pour voir si elle revenait à la charge, je ne sais pas si elle avait essayé de me planter ses serres dans la peau du crâne que j’ai très fragile depuis une intervention chirurgicale. Les sous-bois étant plus touffus, je ne risquais normalement plus rien.

Je me suis alors demandé s’il ne faudrait pas courir bientôt avec le casque lourd ou la tenue de Thomas Pesquet et le poignard du beau Crocodile Dundee.

Arrivé à la maison, j’ai raconté la mésaventure à mon épouse et interrogé internet.

Il s’avère que les buses n’attaquent pas, à proprement dit, mais défendent leur nid quand les oisillons sont prêts à s’envoler au mois de juin et ce, pendant quelques jours. Quand survient un coureur à pied ou un cycliste qui font du bruit et avancent plus vite qu’un marcheur en direction du nid, les buses défendent ce dernier. Comme la meilleure défense est l’attaque, elles écartent les intrus en leur fonçant dessus.

Je l’ai appris à mon dépend.

J’ai pensé à Monsieur Sansonetti, notre professeur de latin qui disait en corrigeant nos thèmes : « Grosse buse, espèce d’âne. » Pas si bête que ça la buse.

Pour dédramatiser, il m’est venue une pensée, amusante à mon goût, en relation avec sa tenue d’astronaute : « En Occitanie, beaucoup se font Pesque(r). »


Michel VIEUX