MAISONS LAFFITTE CULTUREL
ARTHUR KOESTLER (3) :
Je subodore que vous recherchez dans vos souvenirs le titre du dernier livre d’Arthur Koestler que vous avez lu et apprécié, mais le confinement et le port du masque ont ramolli un tantinet vos neurones.
Vous aimeriez bien que je vous aide un peu à retrouver votre mémoire défaillante en énonçant quelques noms d’ouvrages. C’est un peu prématuré, cherchez encore par vous-même.
Vous savez que je suis à moitié rastaquouère par ma mère, j’ai des racines mi-hispaniques, du côté de la province de Murcia, ville de Yecla (certainement) ou Algemesi, j’ai moi aussi oublié le lieu exact, mais c’est proche de Valence et de sa fameuse paella au riz noir (à l‘encre de seiche).
Mes grands-parents maternels ont quitté la misère qui régnait alors dans cette partie de l’Espagne et ont émigré dans l’Hérault, à Cessenon précisément, avec une petite colonie d’ouvriers agricoles, tout comme eux. Ma mère a vu le jour en 1914 sur les rives de l’Orb, ce n’est pas pour autant qu’elle a nagé dans l’or.
On se rapproche de Koestler petit à petit.
En deux mots, je vous explique :
en juillet 1936, Franco fait un coup d’état pour renverser la république espagnole,
en février 1939, Barcelone tombe aux mains des nationalistes et 500 000 personnes fuient l’avancée de l’armée rebelle en se dirigeant vers la frontière française du Perthus et de Port-Vendres à travers les Pyrénées.
Cette “retirada”, c’est le nom donné à cette émigration forcée, cette retraite, a donné lieu à l’émission de nombreuses cartes postales anciennes tragiques où l’on aperçoit des familles entières, des enfants, des blessés tous frigorifiés, faire la queue pour trouver refuge en France et échapper ainsi à la soldatesque franquiste.
Petit-fils d’espagnol et collectionneur acharné, j’ai cherché ces documents avec une passion teintée de chagrin. Un cousin de mes grands-parents aurait passé la frontière et aurait été recueilli quelques temps par eux, puis parti en Provence n’aurait plus donné signe de vie. C’est mon seul lien personnel avec cet épisode malheureux.
Le gouvernement français ne sait pas trop quoi faire (déjà), de cette multitude et va créer des camps de “concentration” dans différents départements proches de la frontière, Pyrénées Orientales en premier, Aude, Hérault, Ariège, Haute Garonne et d’autres.
Arthur Koestler, pour de multiples raisons que je n’ai pas le temps de vous narrer, est incarcéré dans un de ces camps, au Vernet d’Ariège, et c’est là que je trouve sa trace et commence à m’intéresser à lui. Il a risqué sa vie à de multiples reprises.
Il écrit un ouvrage, au titre très fort, détaillant ses quatre mois de “confinement” très forcé : “LA LIE DE LA TERRE”. J’achète la première édition en français, parue chez le grand éditeur d’Alger, Charlot. C’est un témoignage très réaliste et poignant qui se matérialise toutes les fois que je passe devant la maison où il a séjourné.
Je n’aurai alors de cesse que de faire des recherches sur cet homme.
Je crois qu’il est temps que je vous redonne la liberté de profiter du déconfinement.